Facteurs clé de succès dans l’application d’un PIC, ou prix interne du carbone
Episode 1 – La démarche
En matière de développement durable, l’agenda des directions financières est aujourd’hui encore dominé par les enjeux de conformité aux réglementations européennes (Taxonomie Verte, CSRD). On ne dispose donc pas encore de retour significatif d’expériences françaises sur le PIC, à l’exception de ceux des très grands groupes. Pour ces derniers, le PIC est un outil de planification stratégique et de communication institutionnelle. Il est donc difficilement transposable à des entreprises de taille moins importante. Cependant, on peut s’appuyer sur l’expérience des entreprises de toutes tailles acquise sur des sujets présentant de fortes similarités. Plus particulièrement, l’utilisation du prix de revient comme outil de pilotage d’une part, la digitalisation du management de la performance d’autre part[1] va permettre à ces entreprises d’appréhender les aspects organisationnels et les ressources nécessaires à la mise en œuvre d’un PIC.
La clé de voûte de l’organisation doit être une alliance entre la direction financière et la direction RSE. Les modalités de cette alliance varient en fonction des aptitudes et ressources de ces deux directions. Néanmoins, elles doivent au préalable s’associer dans le calcul ou la mise à jour du bilan carbone [2] de l’entreprise. C’est en effet le fondement de toute démarche dans le domaine de la soutenabilité climatique.
La mise en œuvre d’un PIC crée son propre domaine d’expertise dans la mesure où les concepts utilisés n’appartiennent en propre à aucun métier préexistant.
Ensuite, l’utilisation d’un PIC concerne évidemment l’entreprise toute entière : les opérations (production des biens et des services), la logistique, les acheteurs, les ventes et les autres fonctions « supports » (trade compliance, ressources humaines, marketing, juridique, systèmes d’information…). En fonction du cas d’usage du PIC (cf. ci-dessus), ces métiers seront plus ou moins impliqués dans la démarche.
Enfin, le PIC impacte nécessairement de nombreux indicateurs et, en conséquence, le choix des décideurs. C’est la raison pour laquelle l’objectif poursuivi à travers le PIC doit faire l’objet ab initio d’un consensus au sein de l’entreprise. Pour ce faire, quelques bonnes pratiques sont ici rappelées :
– capitaliser sur les enseignements du bilan carbone ;
– communiquer sur le bilan risques / opportunités de la mise en place du PIC, en soulignant le lien avec la demande des clients. Il en va de même avec la stratégie et les objectifs de soutenabilité de l’entreprise ;
– envisager l’adaptation des politiques en vigueur. Cela vise notamment les achats, l’investissement, la fixation des prix de vente, les rémunérations variables liées aux marges ou aux coûts ;
– mettre en perspective les changements induits par le PIC avec la mission et/ou les valeurs de l’entreprise ;
– mener un pilote sur une activité ou une entité ;
– formaliser la répartition des rôles et des responsabilités entre les différentes équipes ;
– partager régulièrement l’information sur l’avancement dans la mise en place du PIC ainsi que sur la mise à jour des procédures et fiches postes concernées.
Nous verrons dans les prochains épisodes que la mise en œuvre et la pérennisation d’un PIC impliquent une évolution du système d’information d’une part et la création d’un nouveau rôle d’autre part
[1] JP Godbillon, Les conditions de l’innovation dans la gestion de la performance des entreprises : comparaison entre deux expériences de gestion sans budget dans des grandes entreprises industrielles européennes, CentraleSupélec, 2017 – http://bit.ly/2NI3s0h, accédé le 15/09/2023
[2] B. Bibard, V. Le Millin, F. Maurice, A. Ruellan, G. Siccat, S. Imielski, L’Essentiel n°4 : Comprendre le Bilan Carbone® – Les enjeux pour les contrôleurs de gestion, DFCG, 2023